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L’éternité, ici et maintenant

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Si je meurs, est-ce que j’irai au ciel ? Est-ce que mon âme sera sauvée ? Est-ce que j’existerai encore, mais sous une autre forme ? Bref ! C’est la question que l’on peut se poser en toute fin de vie: est-ce que je serai sauvé ?  En général quand ceux qui croient à la résurrection espèrent être auprès du Christ. Ils disent aux petits enfants de la grand-mère tout juste décédée : « elle est au ciel. Ils pensent que ceux qui se comportent mal n’iront pas au ciel. Au contraire ». Ils iront en enfer ou au purgatoire pendant un certain temps pour payer leurs fautes. S’ils n’y croient plus trop maintenant, c’était ce que croyaient les chrétiens autrefois. Aujourd’hui ils espèrent simplement survivre et retrouver d’une façon ou d’une autre, ceux qu’ils ont aimés de leur vivant. Celles et ceux qui pensent à ce qui nous arrivera après la mort en tiennent compte dans leur vie ici-bas. Et ne font pas n’importe quoi ! Cela s’appelle « donner un sens à sa vie ».

Le temps s’étire de la naissance à la mort, sur une ligne toute droite. Enfin c’est l’idée que l’on se fait du temps qui s’écoule comme les secondes sur la petite aiguille d’une montre. Et l’on a l’espoir qu’un jour viendra  ou régnera la justice et l’égalité. Les communistes par exemple pensent que le jour où le peuple aura le pouvoir après la lutte finale, ce sera le bonheur. Les chrétiens disent que c’est une utopie. Pour eux, c’est seulement Dieu qui mettra son royaume en place afin que le bonheur règne sur terre. Ce ne seront pas les hommes qui mettront ce royaume en place. Ils peuvent seulement y contribuer pour hâter sa venue.

Les bouddhistes ne croient pas du tout àça. Ils pensent que le temps ne s’étire pas sur une ligne droite, mais que l’être humain est emprisonné dans une sorte de cercle. Il naît, il vit un temps, puis il meurt pour renaître, pour se « réincarner ». Un jour il espère ne plus vivre la réincarnation, car il sera libéré du cercle qu’il appelle le karma. Il s’échappe dans « le grand tout », hors du monde. Il atteint le nirvana. Le sens qu’il peut donner à sa vie est donc de méditer et de se comporter comme il faut pour ne pas se réincarner sous une forme pire que celle dans laquelle il se trouve. Par étape, il espère donc se libérer du karma.

L’homme moderne ne se soucie absolument pas de l’au-delà. Il ne croit pas que Dieu intervient pour son salut. L’homme moderne a les pieds sur terre et n’a pas les yeux vers le ciel. Il fait confiance à la raison. Ce qui lui semble primordial, ce qui donne sens à sa vie c’est la réussite sociale et financière. Par exemple pour ce qui est de ses enfants, il souhaite pour eux la meilleure école et une réussite professionnelle qui les mettre à l’abri. On peut dire que l’argent est ce qui donne sens à sa vie. Son salut il le voit sur terre et pas du tout au ciel. Il n’est pas indifférent à autrui. Mais d’après les statistiques, la moitié de la population est ouverte à autrui et favorable au partage des richesses tandis que l’autre moitié est totalement vouéà l’argent quel que soit le prix à faire payer aux pauvres et aux exclus. Seul leur intérêt prime sur tout le reste.

Et si le temps n’existait pas du tout ? C’est ce qu’Einstein a découvert et démontré. Le temps ne s ‘écoule pas à la même vitesse au sol qu’en altitude. La distinction entre passé, présent et futur n’est qu’une illusion. Le paradoxe des jumeaux en est une illustration. Supposons deux jumeaux. L’un voyage dans une fusée à la vitesse de la lumière ou presque. La durée du voyage pour celui qui est resté sur terre est plus grande que pour celui qui est dans l’espace. Quand le jumeau revient sur terre, il est beaucoup plus jeune que son frère. Ce dernier est même mort depuis longtemps ! Leur temps n’était donc pas le même. Nous pouvons conclure d’après cette image que le temps de l’éternité, celui du Royaume de Dieu, pourrait être tout à fait différent du nôtre. Il peut sans doute se manifester au travers de la présence d’êtres d’élite qui ont fait progresser l’humanité, par flash, comme des éclairs descendus du ciel. Ainsi en a t-il été de Mahatma Gandi, de Martin Luther King, et même de Simone Weil, ces êtres d’élite qui ont fait avancer le monde. Quand l’apôtre Paul dit « C’est Christ qui vit en moi », il participe au Royaume, il est déjà dans l’éternité. C’est ce  qu’il nous invite à vivre, comme si l’éternité c’était ici et maintenant pour le croyant.

Hugues Lehnebach


Présentation du livre « Un Dieu insoumis » de Raphaël Picon [1]

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A la question que chacun se pose sur Dieu, il nous dit que parler de Dieu révèle toujours nos préoccupations les plus ultimes ; que parler de Dieu c’est parler de soi. « Dieu porte l’empreinte de ce que nous sommes ». Et tout au long de chacun des 50 petits chapitres d’une page ou deux du livre « Un Dieu insoumis », tout en parlant de Dieu, Raphaël Picon nous parle de lui, de sa foi, de son optimisme, de sa joie de vivre. Il nous invite donc nous, ses lecteurs, à aller  à la rencontre d’un Dieu que Jésus nous  dévoile.

Quelques aspects de Jésus vus par Raphaël Picon

Sans cesse il revient à Jésus-Christ, car le Dieu de Raphaël  est celui que révèle Jésus-Christ. Voici sa vision de Jésus.

Jésus n’est pas l’homme du mythe, de la naissance virginale, de la mort expiatoire, de la résurrection miraculeuse. La prédication de Jésus est un appel à la vie contre les puissances de mort, contre ce qui déshumanise. Il incarne un Dieu qui nous ouvre à la réalité, à plus de justice, de vérité, de beauté. Il nous appelle à devenir Christ pour les autres. Il irradie d’une vie qui prend sans cesse le dessus. Jésus est l’incarnation du rêve de Dieu pour le monde : celui d’une humanité affranchie de toute forme d’oppression. Jésus est le prophète de la subversion de la vie contre la mort. Il est l’homme de la Parole, du oui de Dieu aux prostituées, aux mécréants, aux pestiférés, aux exclus.

Le Dieu dont parle Raphaël Picon

Dieu est insoumis. C’est-à-dire que Dieu ne se réduit pas à ce qu’en font les religions. Ce n’est pas un concept, un principe, un surhomme tout-puissant. C’est un amoureux du monde. On en avait fait le condensé de nos fantasmes de toute-puissance.  Or il est puissance de l’infini qui permet de résister à la résignation. Il est une énergie qui nous émancipe de tout ce qui nous aliène. Dieu anime le réel de l’intérieur par une force qui ouvre sur demain. Il est source de vie, d’amour, de sagesse. Il est Bonne Nouvelle d’une force créatrice qui nous conduit au meilleur de nous-mêmes. Dieu de la vie permet de croire en la valeur infinie de l’humain.

L’homme

À cette écoute on découvre l’humain. L’homme a une valeur infinie à laquelle Dieu permet de croire. Raphaël Picon  ne peut parler de Dieu révélé par J. C. sans parler de l’être que chacun, chacune est. Ainsi nous découvrons notre identité véritable de chrétien. Il ne décrit pas ce qu’il faut ou ne faut pas croire. Il explicite très simplement ce qui donne sens et vie au croyant. Le lecteur sait à la fin de sa lecture, qui il ou elle est en vérité.

Croire en Dieu c’est croire en l’homme. Dieu intervient en envoyant ses anges, des hommes et des femmes de l’ombre qui font dérailler l’enchaînement mécanique des faits.

Puis, de-ci de-là,  quelques perles parmi bien d’autres

La foi nous engage dans le monde, éveille au désir de convaincre. Elle fait tenir à ce que l’on pense et résiste au relativisme. Il ne faut pas, en effet, s’en tenir par manque de conviction, à l’affirmation de ce qui est seulement « vraisemblable », « possible ». Il faut affirmer sa conviction, ne pas rester dans le relatif ; et accepter en même temps que l’autre en fasse autant, car ma parole n’est pas la seule possible. La foi n’est pas une béquille comme le pensait Nietzsche  C’est une force créatrice à l’œuvre dans le monde.

Confesser le Christ, c’est dire que Dieu est uni à l’homme sauvé et ressuscité. Debout !

Dans les évangiles le surnaturel, le merveilleux, la démesure sont des ruses pour dire la vie en excès.

Être exaucé, c’est être à nouveau capable d’exister, d’être confiant en soi, pour être doté d’amour, de créativité. C’est l’exaucement de nous-mêmes, porté par Dieu.

Très bonne lecture de ces 50 petits chapitres qui nous réconcilient avec nous-mêmes et avec Dieu.

Hugues Lehnebach


[1]Raphaël Picon, Un Dieu insoumis, Labor et Fidès, 2017- (135 pages )

Le Dieu inconscient

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L’être humain n’est pas seulement un être de pure raison. A son insu il est habité par une spiritualité inconsciente, qui le rend véritablement humain. Sinon il ne serait qu’un être mû par ses pulsions. Une religiosité authentique n’a pas le caractère d’une pulsion déterminant l’être humain comme le pensait Freud pour qui  la religion est une illusion narcissique dont l’origine serait le complexe d’Œdipe

L’analyse existentielle met en évidence l’existence en l’être humain de l’inconscient spirituel, d’une religiosité inconsciente, d’une relation inconsciente à Dieu, à la transcendance.  Conséquence : Dieu est toujours inconsciemment l’objet de notre aspiration. C’est le Dieu caché dont parlait Paul aux Corinthiens :  « Quand je parcours vos rues, mon regard se porte souvent sur vos monuments sacrés et j’ai découvert entre autres un autel qui portait cette inscription : au Dieu inconnu. » (Actes 17, 23) 

L’homme croit au sens. La foi dans le sens donnéà sa vie est une catégorie transcendantale. Einstein disait que poser la question du sens c’était être religieux. Tillich ajoute « Être religieux c’est poser fiévreusement la question du sens de notre existence ». L’homme se rapporte à un monde supérieur. On ne peut vouloir croire, pas plus qu’on ne peut vouloir aimer par un coup de foudre par exemple. Le sens n’est pas donné. Il faut le trouver. 

L’être humain tend vers l’au-delà de lui-même. Il s’attache à quelque chose qui n’est pas lui-même, et l’oriente en direction du monde. Il cherche un sens. Trois orientations sont possibles :

       1 - consacrer sa vie à une oeuvre, à une cause. L’être humain sent qu’il se réalise dans la mesure où il s’oublie et se donne par exemple à une tâche, à une oeuvre.

       2 - se consacrer à une personne qu’il pourrait aimer.

      3 - Enfin, l’être qui est proche de la mort, ou est en souffrance à cause d’une maladie sans espoir de rémission peut se transcender et assumer sa souffrance et lui donner sens par son attitude.

Ce qui donne sens est dicté en réaction à une situation concrète qui impose une réponse, dicte ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Ce n’est donc pas une solution donnée par quelqu’un qu’il soit  homme d’Église, ou psy. C’est le sujet qui trouve la réponse en conscience, en être responsable.

Un homme peut trouver un sens à sa vie indépendamment de son sexe, de son âge, de son intelligence, de son environnement, qu’il soit croyant ou pas. Il accède alors à une vie religieuse en accédant à l’au-delà de lui-même, sans pour autant manifester cette vie spirituelle dans une institution religieuse. En adhérant par exemple à des croyances, à des dogmes.

En quête du sens ultime à donner à son existence, la personne peut avoir, dictée par son inconscient spirituel, une intuition le guidant vers la révélation.

Nous n’allons pas vers une religion universelle, mais vers une religion personnelle. Chaque individu a sa propre religiosité, définit sa compréhension de Dieu d’une façon spécifique. Frankl[1] illustre cette idée en faisant remarquer que pour représenter le ciel le peintre dessine des nuages. Or les nuages ne font que symboliser le ciel avec lequel ils n’ont rien à voir. De même pour parler de Dieu, nous utilisons des symboles qui n’ont rien à voir avec Dieu. Ainsi en est-il de la foi de chacun. Les religions se définissent en général comme universelles et envisagent leur avenir comme finissant par imposer leurs dogmes au monde entier. En fait chacun ayant sa propre définition et vision  de Dieu l’exprime à titre uniquement personnel. « Dieu serait ainsi le partenaire des entretiens les  plus intimes avec soi-même. » La rencontre avec l’autre, la découverte de sa façon de vivre sa foi est un immense enrichissement à partager. Le partage de toutes ces spiritualités personnelles pourrait être alors ce qui caractérisera la fin des religions ; et peut être la naissance de la religion d’amour ?

La religion finirait par être l’expression de langages personnels dont chacun pourra se servir pour s’adresser à Dieu, avec le langage d’une spiritualité aux formes d’expression multiples.

Hugues Lehnebach


[1] Frankl, Le Dieu inconscient, Interédition, 2016

L’énorme changement

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Nous vivons le temps d’un énorme changement qui modifie considérablement notre façon de vivre, de comprendre la vie. On a donnéà ce temps le nom de post modernité ou d’ultra modernité. Nous avons appris que la terre n’était pas au centre du monde, nous avons retenu les leçons des Lumières,  connu l’industrialisation, la dérégulation du capitalisme. Nous vivons maintenant la révolution de la communication. Le changement fondamental que cela a produit est que nous ne donnons plus à Dieu le même  sens que celui que nous lui donnions il y a à peine 50 ans.

Nous avons cru pendant des siècles que Dieu était dans un autre monde, dans un monde surnaturel duquel il pouvait intervenir dans notre monde. La religion était ce qui donnait une cohérence à la société. Pendant très longtemps nous pensions que Dieu déléguait son autoritéà un roi. Chacun avait une place, un rôle à jouer dans la société. C’était ce qui définissait notre  identité. On n’y était pour rien. C’est Dieu qui l’avait voulu.

Puis il y a eu un premier changement quand l’individu a pensé qu’il pouvait dialoguer avec un Dieu qui n’était plus une terreur mais un Dieu qui aimait l’homme et voulait son bonheur. L’homme a donc existé en tant que personne responsable. Le roi n’était plus utile. Lui couper la tête a pris quand même du temps. Puis les hommes ont élaboré leurs lois pour gérer le fonctionnement de la société. C’est l’individu qui en est devenu le fondement. Ce n’était plus la société qui déterminait la personne.

Le résultat est le changement que nous vivons aujourd’hui. La religion est devenue personnelle. Le théisme qui voyait Dieu comme un être existant dans un monde surnaturel s’est évanoui. Il a disparu. Dieu est toujours là pour donner un sens à l’existence de chacun. Mais c’est la personne qui donne son nom à Dieu. La religion est devenue personnelle. Chacun a donnéà Dieu le nom qui lui convenait. Il n’est plus question qu’une religion décide d’imposer au monde entier sa vision du Dieu unique. Partager nos visions de Dieu semble beaucoup plus intéressant. Même si elles n’ont rien à voir avec la réalité de Dieu.

Ian Harris, dont Gilles Castelnau a diffusé sur son site « protestantsdanslaville » une traduction, a une idée géniale. Il suggère d’abandonner l’idée théiste pour vivre la sécularisation. On se souvient que la sécularisation a été la décision prise en son temps par l’État de s’approprier les biens de l’Église. Par la suite, l’État s’est également approprié les valeurs que valorisait l’Église. Ainsi on a « laïcisé » si je puis dire, les valeurs que l’Église avait défendues, que ce soit celles de la famille, de l’éducation, du travail, de  la tolérance. Jean Paul Willaime résumait le fait que notre société laïque est restée culturellement chrétienne par la formule « La France est un pays laïque de culture catholique »[1].

L’objectif proposé par Ian Iarris est de recréer les symboles avec lesquels on peut exprimer le sens de la transcendance en spiritualisant les réalités qui sont devenues le fondement de notre existence, du banal de notre quotidien, de ce qui peut donner sens à notre existence. Cela touche les problèmes très concrets de la santé, du respect de la nature, de la solidarité, de la condition humaine, des conditions du travail, de l’amour partagé. Bref, de la vie de tous les jours. Cela implique la création de nouveaux rituels qui scellent la vie communautaire.

Serge Soulié rapporte l’expérience qu’il a faite pour soulager une femme alcoolique désireuse de se libérer de son intoxication[2]. Il lui a appris à dialoguer à haute voix avec elle-même pour exprimer clairement sa prise de conscience, définir le sens ultime qu’elle voulait donner à sa vie. Elle s’est donc entraînée à formuler la demande dont elle prenait conscience. Elle priait sans bien savoir à qui elle s’adressait. Le fait important est qu’elle s’adressait à son Dieu, partenaire de ses entretiens les plus intimes. Son désir ultime, ce qui donnait sens à son existence venait peu à peu au jour. Elle laissait parler son inconscient spirituel pour dire ce qui pouvait donner sens à sa vie. C’était à son Dieu qu’elle s’adressait. L’aboutissement de ce cheminement spirituel fut la guérison. Prier c’est se livrer à ce soliloque, à ce monologue à haute voix qui entre ouvre la porte à l’intuition qui manifeste la présence en soi de l’inconscient spirituel à l’œuvre.    C’est ce qu’explique Victor Franckl dans son livre Le Dieu inconscient.

Des prophètes de la sécularisation se trouvent parmi nous sans que nous en ayons conscience. Je pense par exemple à Rabhi, l’apôtre de la sauvegarde de la nature, et à Nelson Mandela, Gandhi, Martin Luther King. Ainsi des personnages hors du commun témoignent de la présence spirituelle qui les habite bien que ne faisant pas toujours parti de la religion bien en place. Dans l’évangile de Marc nous avons une démonstration de ces présences qui témoignent de Dieu bien qu’étant hors des circuits religieux habituels.  « Jean lui dit ( à Jésus ), nous avons vu quelqu’un qui chassait les démons en ton nom et nous avons cherchéà l’en empêcher parce qu’il ne nous suivait pas. Mais Jésus dit : « ne l’empêchez pas , car il n’y a personne qui fasse un miracle en mon nom et puisse aussitôt après parler mal de moi. Celui qui n’est pas contre nous est pour nous ».[3]

 


[1] Jean Paul Willaime, Le retour du religieux dans la sphère publique, Éd. Olivetan 2008.

[2] Serge Soulié, La fin d’une religion, Ed La barre Franhe 2017

[3] Marc 9, 38-41

Sens d'une nouvelle vie

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Voici du nouveau, à commander àhugues.lehnebach@yahoo.com au prix de 8 €uros (prix de lancement pour les amis).

Le pasteur Hugues Lehnebach nous offre ici d'une manière extrêmement claire et vivante l'évolution du climat religieux qu'il a vécue au cours de son long ministère.

Il anime et accompagne de nombreux groupes de réflexion réunissant des protestants, des catholiques, des agnostiques en recherche de spiritualité, il les écoute, les comprend, les aide à réfléchir et à lire les ouvrages de théologie contemporains : il a créé pour cela une bibliothèque circulante très active.

Et il nous fait part dans ce livre des rejets réels dont il est le témoin de conceptions doctrinales traditionnelles qui ne sont plus admises par les esprits modernes, qu'ils soient protestants ou catholiques.

Hugues Lehnebach est un homme cultivé qui se tient parfaitement au courant des recherches spirituelles des plus importants théologiens actuels et il sait nous en présenter les thèses libératrices.

Nul doute que ce livre profond et juste tout en étant agréable et facile à lire, permettra à de nombreux lecteurs de renouveler leur vie spirituelle et pour beaucoup, de se réconcilier avec Dieu.

Éditions La Barre Franche, août 2018


Lire aussi la présentation et des extraits du livre sur le site «protestants dans la ville»-> ici

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Choc entre les acquis du passé et nos réponses récentes

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Depuis peu la recherche sur le Jésus de l’histoire et sur les sources bibliques se développent d’une extraordinaire façon. Cela pose des questions fondamentales. Une relecture des  textes fondateurs du christianisme est possible.  La mise au jour de la façon dont les auteurs bibliques ont relaté leurs découvertes nous questionne. En effet ces auteurs vivaient dans un monde très différent du nôtre. Ils croyaient par exemple que la terre était plate, recouverte d’une grande demie coupole qui sépare notre monde de celui où Dieu habite. Cette coupole pensaient-ils, séparait les eaux terrestres des eux célestes. Cette sorte de cloche  percée de trous permettait à Dieu de déverser de temps à autre la pluie ou le déluge.

Une relecture des textes fondateurs du christianisme est nécessaire. Sinon le gamin de douze ans auquel je faisais le catéchisme, serait resté parfaitement sceptique. En effet il avait constatéà la lecture du premier chapitre de la Genèse que d’après le troisième verset, Dieu avait fait surgir la lumière mais n’avait pourtant créé le soleil qu’au verset 14. Cela ne lui semblait pas très logique. Il avait bien raison.

Pour garder notre foi nous faudrait-il adopter la vision du monde qu’avaient les auteurs bibliques ? Avoir la foi ne consiste pas à croire par exemple ce que dit l’évangile de Matthieu quand il affirme qu’à la mort de Jésus « la terre trembla, les rochers se fendirent, les tombeaux s’ouvrirent, les corps de nombreux saints ressuscitèrent ». Il est plus utile de chercher le sens du mythe et de partager l’expérience existentielle de celui qui raconte ces faits.

Les Églises ont beaucoup de mal à s’adapter au changement. Elles préfèrent s’en tenir à ce qui était considéré comme vérité par le passé. En 1992 l’Église catholique a publié un catéchisme de 650 pages pour fixer tous les aspects de la doctrine définissant la vérité détenue par l’Église depuis toujours. Et, par fidélitéà ces vérités du passé,  le pape peut dire parois des bêtises.  De leur côté, les évangéliques du Texas restent opposés à la théorie de l’évolution telle que la définissait Darwin. Ils considèrent qu’il faut prendre la Bible à la lettre. C’est pourquoi ils pensent que la terre a bien été créée il y a environ 6 000 ans.

Comment revenir à la Parole vivante ? Comment traverser l’épaisseur des cultures qui nous séparent du passé ? C’est ce qui nous conduit à penser qu’il faut démythologiser.  Le mythe est une enveloppe du langage liéà une certaine représentation du monde. Cette représentation n’est plus la nôtre aujourd’hui. C’était un monde à trois étages avec le ciel, la terre et l’enfer. L’évangile a été prêché dans une culture où cela allait de soi. La démythologisation est donc l’œuvre permise par la culture scientifique dans laquelle nous vivons ; Le mythe est préscientifique. Il tenait à l’époque lieu de science.

Le mythe parle de l’origine et de la limite de notre vie qu’il représente sous la forme d’un second monde, d’un arrière monde, d’un au-delà. Le mythe est l’œuvre de la foi. L’homme de science refuse ce faux monde qui s’efforçait  de répondre à la question  posée dans le cadre de référence du passé. Il nous faut reprendre la réponse toujours valable de la foi mais la transposer dans notre univers en interprétant le texte.  

 

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Le sens cosmique

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La modernité a donné un sens à la vie qui n’est plus fondé sur un grand projet cosmique et divin. C’est maintenant l’homme qui donne un sens à sa vie. Ce n’est plus Dieu. La religion est devenue humaniste, car elle voue un culte à l’humanité, et non à Dieu. Les humains cherchent à puiser dans leur expérience intérieure le sens à donner à leur vie et à tout l’univers. Pour la modernité, Dieu n’est plus la source du sens et de l’autorité. C’est notre libre arbitre qui en est la source, l’autorité suprême.

L’humanisme s’est scindé en 3 branches : La branche orthodoxe est la première. Elle considère que chaque être humain est un individu unique, un rayon de soleil. Conséquence ? Il faut donner à l’individu le plus de liberté possible. C’est en nous que nous devons trouver toutes les réponses. Le résultat est l’humanisme libéral.

La deuxième branche est celle de l’humanisme socialiste qui prône la mise en place des institutions collectives auxquels il faut faire confiance. Ces instances décident à notre place. Le goulag ou le nationalisme en est la plupart du temps, l’aboutissement.

La dernière branche est celle del’humanisme évolutionniste qui est favorable à la sélection naturelle qui favorise les plus forts. Le résultat est celui de l’ultracapitalisme qui a fini par conquérir le monde et s’est montré plus efficace que le socialisme. La loi du marché a pris toute la place et décide pour nous. La vie n’a plus d’autre sens que celui de la croissance et de la consommation.

Grâce aux progrès extraordinaires de la science, la voie est maintenant libre pour les nouvelles technologies posthumanistes. Les développements technologiques rendront sans doute les humains économiquement et militairement inutiles. Le marché, la démocratie ne survivront pas. Les algorithmes de Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft et autres sont devenus souverains. Les politiciens sont à leur écoute, parfaitement soumis. Comme les rats, les hommes sont manipulables. La dernière menace sur le libéralisme sera la formation d’une petite élite privilégiée immensément riche qui gérera les élections à son plus grand profit.

L’individu libre peut devenir une fiction créée par l’assemblage d’algorithmes biochimiques. L’intelligence artificielle se développe. Pour qui ? Pour quoi ? Pour quel sens ? Elle ne le sait pas, car elle ne pense pas. La connaissance pourtant serait-elle le salut ? C’est ce que croyaient déjà les gnostiques au deuxième siècle.

Les mythes d’autrefois révélaient une vérité sous forme d’histoires auxquelles on pouvait ne pas croire. Aujourd’hui, il ne nous reste plus qu’à interpréter ces mythes, décrypter ces symboles contenus dans les Écritures pour y trouver le sens à donner à notre vie.

Les évangiles étaient porteurs d’espoir. Les chrétiens de l’Église primitive étaient habités par la certitude de quitter un jour ce monde perverti pour rejoindre le Christ ressuscité dans l’au-delà. Le Christ tardant à revenir, l’Église a tenté de prendre le pouvoir pour installer son règne. Fiodor Dostoïevski a démontré l’échec du grand inquisiteur.

L’individu s’est peu à peu libéré de la tutelle de l’Église pour affirmer son autonomie. Il a tenté de mettre en place des utopies. L’échec du communisme et du nazisme furent des désastres. Nous vivons maintenant l’utopie de l’ultralibéralisme préparant la mort annoncée de la planète.

L’issue pour nous maintenant est sans doute dans la quête d’un sens cosmique.

Où se trouve le sens cosmique ? « C’est en Dieu qui se trouve… au cœur du monde comme le levain qu'une femme a enfoui dans la pâte pour la faire lever » (Matthieu 13, 33)

Il n’est pas tout puissant. Il ouvre sans cesse l'avenir, introduisant des possibilités nouvelles dans nos pensées et dans le monde : mais il ne détermine pas de manière autoritaire celles qui seront acceptées ou refusées par les hommes. Il propose, appelle, influence, enthousiasme ; il tient compte des résultats qui en adviennent pour modifier son action : c'est la joie qu'il veut pour ce monde « qu'il aime tant » (Jean 3,16).

« Il est créateur, non seulement au-dedans de nous les hommes, mais aussi des animaux, des plantes et peut-être aussi des minéraux ; Il est indispensable à la vie du monde ; il participe à tout ce qui se passe, à toutes les réalités auxquelles nous avons affaire et d'abord à nous-mêmes. Il agit en tout ce qui bouge ; évolue ; rien n'échappe à son action de même que rien n'échappe aux rayons du soleil et à l'air qui nous baigne ». (Gilles Castelnau)

Il appartient à chacun d’entre nous, et non aux Églises, de répondre à cette invitation pour que chacune, chacun, coopère à sa mesure à cette œuvre, et de fasse confiance en l’avenir malgré tout. C’est l’espoir mis en Dieu tel que l’annonçait Jésus Christ qui évita àJacques Ellul de se suicider.

Hugues Lehnebach

In les «Les frères Karamazov ».


Le Dieu de notre inconscient

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La réflexion très personnelle de Serge Soulié et de Victor Frankl est du plus grand intérêt. J’en présente ici ce qui me semble en être l’essentiel chez l’un, pasteur atteint d’un cancer, et chez l’autre, victime triomphant de la déportation.

Le Dieu que nous confessons est le Dieu de nos représentations. Ces représentations sont systématisées dans les dogmes, des rites, des croyances. En fait, le fidèle considère par sa lecture des textes bibliques que le Dieu dont on y parle ne se distingue guère de sa propre représentation. Il faut faire un effort pour découvrir dans ces textes un Dieu qui diffère de celui dont on s’est fait une idée. Pourtant la modernité a démontré que les auteurs bibliques avaient une représentation de Dieu qui ne peut plus correspondre à notre culture. Dieu n’est pas un être qui peut agir de façon surnaturelle. Le théisme est une aberration mentale. Baruch Spinoza avait, il y a bien longtemps, dénoncé le fait que l’homme attribue à Dieu ce qui l’habite lui-même, que ce soit intentions, émotion, colère, désir de toute puissance.

En fait l’homme est « agit » au sein de la nature comme le petit enfant est agi par sa mère. Dieu est substance infinie. Il est la nature infinie agissant en tout être et en toute chose. A sa naissance le petit enfant sort du bain placentaire, mais il est totalement inséré dans le bain du langage, par les mots prononcés à son sujet avant même qu’il ne soit déjà là. Comme Jacques Lacan le disait, l’enfant est déjà présent dans l’inconscient de ses parents. Pour lui, le monde et sa mère ne font qu’un. « Le monde mère est infini comme la Nature de Baruch Spinoza ».

De la même façon que le père intervient dans la relation mère enfant pour que ce dernier permette à l’enfant de prendre ses distances vis-à-vis de sa mère pour devenir lui-même, Jésus Christ intervient dans notre dialogue avec le Dieu dans lequel nous nous sommes englués, en en faisant un être tout puissant à l’image que nous en avions faite, afin que chacun devienne lui-même et s’assume. J’ajouterai ici : Ne dirait-on pas que lorsque Jésus sur la croix s’écrie « Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné », c’est que Dieu s’est effacé pour laisser l’homme s’assumer pour être lui-même. Il s’agissait du Dieu que nous nous étions forgé bien sûr. C’est ce dieu-la qui abandonne Jésus.  

Serge Soulié ajoute que « l’arrachement radical à cet empire du religieux, c’est l’oeuvre de Jésus constamment en butte à la religion, parce que celle-ci, de diverses manières, continue à retenir l’homme pour qu’il ne se lève pas. Elle l’enveloppe et le cajole comme une mère possessive… « Elle barre son accès à l’autonomie et à l’autodétermination »[1]

Pour clore cette page, l’auteur ajoute : « Avoir la foi, c’est chercher le Dieu qui n’existe pas ».

L’organe du sens

Il m’a sembla que la réflexion de Victor Frankl corrobore l’hypothèse de Serge Soulié. [2] C’est la conscience qui est l’organe du sens. Le sens varie d’une personne à l’autre. La conscience de Dieu ne se réduit pas à une affirmation théologique, dogmatique. L’homme choisit entre écouter sa conscience ou pas. Mais voici que grâce à l’intuition, l’inconscient spirituel permet parfois que jaillisse une prise de conscience qui ouvre la porte à une révélation, disons à une prise de conscience de la réalité divine. Victor Frankl pense que nous allons alors vers un religion personnelle, et non vers une religion qui s’imposerait à tous.

Selon Sigmund Freud, le principe de plaisir est le moteur fondamental de l’être humain. Il avance l’idée que le principe d’autorégulation physiologique fonctionne de telle sorte que l’appareil psychique veille à ce que la quantité d’excitations  venant de l’extérieur comme de l’intérieur s’équilibre pour satisfaire la demande de plaisir.

Frankl par contre a une idée beaucoup plus positive de l’homme. Il ne le voit pas comme le simple résultat de pulsions agitant son inconscient mû par le seul souci de satisfaire son désir. Il considère au contraire que ce qui constitue  l’être humain tend vers l’au-delà de lui-même. Il s’attache à quelque chose qui n’est pas lui-même, et s’oriente en direction du monde. Il cherche un sens ou une personne qu’il pourrait aimer. Il sent qu’il se réalise dans la mesure où il s’oublie et se donne par exemple à une cause. Il est même capable de donner un sens à sa souffrance s’il est atteint d’un mal sans espoir de rémission. Il peut s’auto transcender pour ne pas s’enfermer dans un rôle de victime souffrante.

Quand la volonté de sens est frustrée, le sentiment de sens, d’absurdité s’installe avec le vide intérieur. C’est le vide existentiel. La société industrielle a pour seul but de satisfaire les besoins humains. La société de consommation crée des besoins pour pouvoir les satisfaire. La société consumériste a engendré la triade drogue, agression, dépression.

Mais ce qui donne sens est dicté par toute situation concrète qui demande, impose une réponse, dicte ce qu’il faut faire ou ne pas faire.

Un homme peut trouver un sens à sa vie indépendamment de son sexe, de son âge, de son intelligence, de son environnement, qu’il soit croyant ou pas. Il accède alors à une vie religieuse en accédant à l’au-delà de lui-même, sans pour autant manifester cette vie spirituelle dans une institution religieuse.

Nous n’allons pas vers une religion universelle, mais vers une religion personnelle. Chaque individu a sa propre religiosité, définit sa compréhension de Dieu d’une façon spécifique. Frankl illustre cette idée en faisant remarquer que pour représenter le ciel le peintre dessine des nuages. Or les nuages ne font que symboliser le ciel avec lequel ils n’ont rien à voir. De même pour parler de Dieu nous utilisons des symboles qui n’ont rien à voir avec Dieu. Ainsi en est-il de la foi de chacun. Les religions se définissent en général comme universelles et envisagent leur avenir comme finissant par imposer leurs dogmes au monde entier. En fait chacun ayant sa propre définition et vision  de Dieu l’exprime à titre uniquement personnel. La rencontre avec l’autre, la découverte de la façon de vivre sa foi est un immense enrichissement à partager. Le partage de toutes ces spiritualités personnelles sera alors ce qui caractérisera la fin des religions et la naissance de la religion d’amour. Telle est l’hypothèse de Frankl.

La religion finira par être l’expression de langages personnels  dont chacun pourra se servir pour s’adresser à Dieu, avec le langage d’une spiritualité aux formes d’expression multiples. « Dieu serait ainsi le partenaire des entretiens les  plus intimes avec soi-même. »

Hugues Lehnebach  


[1] Serge Soulié, La fin d’une religion.Éd. La barre Franche.

[2] Victor Frankl, Le Dieu inconscient.. Éd. Inter inconscient 2012

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Comment les mythes disent vrai

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Jacques est athée et très rationaliste. Il m’a demandé pourquoi je continuais à lire ma Bible. Il pense que si cela me fait plaisir de lire des contes de fées, c’est bien. Sinon, à son avis, c’est parfaitement stupide. Les onze premiers chapitres de la bible sont en effet des mythes qui racontent la création du monde et de l’homme. L’attitude de l’homme raisonnable du XXIe siècle doit, pense cet ami,  se contenter de « démythiser » ces récits. La démarche est simple. Si je prends le mythe pour une fable, une légende, un conte inventé par un lointain ancêtre qui s’efforçait de trouver des explications à ce qui lui paraissait inexplicable, je peux retirer du récit tout ce qui contrarie ma raison afin de rendre ma foi religieuse acceptable. Hélas ! Ce n’est pas du tout ce que font les évangéliques du Brésil ou du Texas. Ils croient dur comme fer que l’homme et la femme ont bien été créés par Dieu comme le dit la Bible il y a 6 ou 7 000 ans. Le mouvement du créationnisme né au début du xxe siècle en réaction contre Darwin, s’efforce de prouver que le déluge a bien existé et qu’íl est possible de trouver un jour les restes de l’arche de Noé. Pour eux les espèces humaines sont restées séparées et inchangées depuis leur création. Leur but est d’éliminer tout ce qui s’oppose aux acquis scientifiques, à notre vision moderne du monde. Ils veulent simplement rendre la religion chrétienne recevable une fois éliminés les aspects inacceptables du mythe pour la raison. « La démythisation reste, au contraire, dans le registre de la preuve ou de la raison de croire et donc dénie la foi comme foi ». [1]

Pour une démythologisation

Mon ami Jacques a bien du mal à comprendre que le mythe n’est pas un monde du merveilleux qu’il faudrait rationaliser. Il lui faut comprendre que démythologiser va consister à arracher le message transmis par le mythe qui contient une nouvelle compréhension de l’existence. Beaucoup considèrent le langage mythique comme « primitif ». Selon cette compréhension, il leur faut extraire du mythe le sens profond dont il est porteur, en le formulant de façon intelligible pour la raison. Le mythe contiendrait un « savoir » caché sous une enveloppe narrative. Ils ont une mauvaise compréhension du mythe. Le langage mythique est une tentative de raconter quelque chose qui ne relève pas du savoir, mais de ce dont il est impossible de parler, à savoir le rapport de l’homme à sa destinée et à l’altérité. Le mythe cherche à exprimer le mystère des origines de l’homme et son devenir. Le mythe essaie d’exprimer l’indicible, de l’approcher autant que possible et d’en traduire les conséquences pour l’existence humaine. Il ne s’agit donc pas de retraduire le mythe dans un langage acceptable, mais d’entendre la question fondamentale que le mythe aborde avec sa réponse. Il faut laisser résonner en nous l’interrogation essentielle et y répondre dans son existence singulière. Il s’agit de faire sienne, ou de rejeter, la réponse que propose le mythe. Chaque mythe déploie une compréhension du monde, une compréhension de l’homme, de la divinité, de l’altérité.  C’est cela qu’il faut essayer d’entendre.        

Dans son intention initiale, le mythe raconte la manifestation dans notre monde, d’un au-delà. Il en est de même de mon écoute de la parole de Dieu. Il s’agit alors d’une rencontre qui m’aide à me comprendre, à dire le sens de mon existence. Quand je rencontre un mythe, je me pose la question : qu’est-ce que cela me dit de mon vécu ici et maintenant ?

Les différents niveaux de compréhension du mythe

Les auteurs du mythe avaient une conception du monde qui n’est plus la nôtre héritée de la science et marquée par la technique. Leur cosmologie était celle d’un monde à trois étages qui comprenait le ciel, la terre et l’enfer. Ils voyaient ce monde peuplé de puissances surnaturelles.  C’est dans cette vision du monde qu’ils disaient qu’elle était leur conception de l’homme, de ses limites, de leur relation avec le tout autre. C’est le premier niveau de compréhension du mythe.

Au second niveau,  à l’aide du mythe, l’homme opère une explication de son origine, de sa propre fin, de ce qui le fonde, lui donne sens, et de ce qui le limite. Il s’approprie l’au-delà, le domestique pour le transposer dans un récit ici-bas, dans notre univers. Le premier niveau s’appuyait sur une vision préscientifique. Le second niveau s’appuie sur une compréhension théologique et philosophique.

Un exemple de la démarche

Le Nouveau Testament est dans son architecture un texte mythique. C’est un récit qui réfléchit à l’existence humaine, à la réalité du monde, qui se pose les questions suivantes : d’où vient l’homme ? Où va-t-il ? Quel sens a la vie ? Pourquoi la mort ? Quelle relation avec l’altérité ?  Avec le  tout autre ?

Il explique que les grandes énigmes de l’existence se trouvent dans un éclairage nouveau, celui de la personne de Jésus de Nazareth. Le Nouveau Testament est une invitation à mettre sa foi dans ce personnage. Il propose des réponses qui diffèrent des réponses apportées par le discours mythique du judaïsme, des mythes gréco-romains qui ont pu, ici ou là, inspirer le judaïsme. Ces réponses s’avèrent positives pour nous même aujourd’hui.

Le Nouveau Testament démythologise l’Ancien Testament qui lui-même avait déjà démythologisé les conceptions babyloniennes de la création. Dès la lecture du premier chapitre du livre de la Genèse, les astres ne sont plus considérés comme des divinités. Le soleil, la lune et les étoiles sont déclarés créations de Dieu, seul véritable Dieu. Le Nouveau Testament va à son tour démythologiser les représentations judaïques du royaume. L’évangile de Jean par exemple présente le Royaume comme « déjà là » et non plus comme un royaume à venir, à dimensions eschatologiques.

La démythologisation liée à l’interprétation permet de prendre conscience du revêtement mythologique dans lequel l’annonce selon laquelle le Royaume de Dieu s’est approché de façon décisive. Après avoir analysé le mythe, puis après l’avoir interprété, l’homme de foi peut y voir l’acte de Dieu.

Hugues Lehnebach


[1]Élian Cuvillier, Jean Daniel Causse, Mythes grecs, mythes bibliques, Éd. Cerf, 2007, p. 17.

 

Pour un néo christianisme

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 Sur les pas de John A. T. Robinson…

John  A. T. Robinson était évêque anglican. Il n’était pas du tout incroyant, mais il était soucieux de tenir compte de l’évolution des mentalités dans un monde de plus en plus sécularisé. John A. T. Robinson a fait paraître un livre en 1964 intituléDieu sans Dieu (Honest to God en Anglais). Une notion qui lui semblait essentielle était l’image que l’on se fait de Dieu dans l’Église. Il parlait de remodeler, de reformuler ce qui constitue le fondement de la foi chrétienne : « Je  crois, disait-il, que nous sommes dans les années à venir, à beaucoup plus qu’une simple réaffirmation, en termes modernes, de l’orthodoxie chrétienne. …un remodelage beaucoup plus radical est à mon avis nécessaire et, dans ce processus, les catégories les plus fondamentales de notre théologie, de Dieu ; du surnaturel, et de la religion elle-même, doivent être de nouveau jetées au creuset ».  Convaincu comme Robinson qu’il faut réaménager les bases de notre catéchisme,  je me suis permis de puiser dans ce livre quelques données de réflexion

Dietrich Bonhoeffer auquel John A.T. Robinson se réfère disait que le christianisme est un système de religion qui a 2 000 ans. Or voici que depuis 500 ans environ nous entrons peu à peu dans un monde totalement dépourvu de croyances religieuses. Toutes les croyances sur lesquelles reposait ce système religieux s’effondrent. Il est très intéressant d’en connaitre les raisons. L’une d’entre elles est la vision du Dieu auquel l’Église continue  à se référer à mon désespoir car c’est une des raisons de la perte de la crédibilité du christianisme au détriment de l’Évangile. Il n’est pas étonnant que les églises se vident.

« La Bible nous parle du Dieu « d’en haut » (d’un Dieu qui se situerait « là-haut »). Sans aucun doute, l’image qu’elle donne d’un univers à trois étages,- « en haut le ciel, au dessous la terre et, sous la terre, les eaux », a été prise jadis dans son sens le plus littéral. Nul doute que les auteurs de l’Ancien Testament, si on les avait interrogés, auraient été les premiers à proclamer que pour eux ce langage n’était qu’une façon symbolique de représenter et de transcrire des réalités spirituelles.

Hugues Lehnebach

La disruption de l'Église

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Interpellé par un ami qui s’interrogeait sur le fait que son église ne réussisse pas à recruter de nouveaux membres malgré l’excellent travail qui s’y fait, ma première réaction a été de rédiger une note sur cinq pages pour énumérer toutes les idées qui me venaient à l’esprit pour faire venir du monde. Puis, avant d’envoyer cette note à l’ami en question,  je l’ai fait lire à mon épouse. Elle est souvent de bon conseil. Sa réaction a été surprenante. Elle m’a dit :  «  Tu as beaucoup d’imagination mais ce que tu proposes n’est qu’une rustine sur une chambre à air dégonflée. Il vaudrait mieux changer la chambre à air, c’est-à-dire ton église ».

J’étais navré. Changer l’Église est bien au-dessus de mes compétences.  J’ai donc essayé de me changer les idées. Par chance je suis tombé sur un livre écrit par Serge Soulié dont le titre  est « La maison du rêve »[1]. Je l’ai lu. Et c’est dans cette maison du rêve que j’ai trouvé la réponse. Je n’ai plus qu’à vous envoyer une des pages de ce livre. Lisez là. Elle m’a semblé bien résumer l’esprit du bouquin que vous pouvez acheter, et vous pourrez rêver avec moi en réfléchissant à la meilleure façon de se mettre au boulot.

« Nous devons repenser l’Église dans le contexte actuel. Aujourd’hui, nos manières de penser les entreprises, les expériences, les institutions, nos représentations du monde, nos valeurs sont bouleversées. Comment nos représentations de Dieu, la place  et la nature des Églises pourraient-elles échapper à ce bouleversement ?

Dans le monde anglo-saxon, on parle de révolution brutale, mais inéluctable pour qualifier notre époque. Il ne s’agit pas seulement d’une mutation mais d’une  révolution qui rend obsolète, et ringardise  ce qui fonctionne sur un mode ancien. Cette révolution est appelée « disruption ». Le terme signifie à la fois rupture  et séparation. Il a été tout d’abord utilisé dans le marketing et l’économie. Puis il s’est étendu à d’autres domaines. Pourquoi ne pas l’utiliser pour la religion, ses croyances et ses institutions ? Le mot fait peur. Il traduit l’émergence d’un nouveau monde à une vitesse inouïe et foudroyante.

L’Église installée depuis vingt siècles et, il faut le dire quelque peu endormie, est prise à rebours. Habituée à suivre des règles sans prendre de risques, à imposer son exemplarité, elle vit mal la transgression aussi intelligente soit-elle. Elle n’a pas pris la mesure de l’attitude  de l’apôtre Paul qui a été très disruptif lorsqu’il a considéré que la circoncision n’était pas nécessaire ou lorsqu’il autorise à manger des viandes sacrifiées aux idoles, puisque pour lui, il n’y a pas d’idoles.

Jésus par son « vous avez entendu qu’il a été dit…mais moi je vous dis », ou encore en autorisant ses disciples à arracher des épis le jour du sabbat, est aussi très disruptif. C’est un bouleversement, un rejet de la tradition, considéréà l’époque comme une folie. « Dieu a convaincu de folie la sagesse du monde » ou « supportez de ma part un peu de folie »écrira l’apôtre dans ses épîtres aux Corinthiens. A chaque annonce d’une ambition de disruption, les  garants des traditions et de la théologie orthodoxe crient au dérapage et à l’impossibilité. Ils empêchent, avec leurs modèles obsolètes, toute nouvelle « folie ».

Le libéralisme, souvent montré du doigt, fait l’expérience de cette aversion de notre cerveau pour la perte. Il se heurte à ceux qui refusent la disparition de l’ancien monde alors qu’un monde nouveau, une théologie nouvelle frappe à leur porte. Les anti-libéraux considèrent que la disruption est un danger alors que c’est une bonne nouvelle pour renouveler le christianisme et, au-delà, les religions. Mieux encore, c’est une bonne nouvelle pour l’homme.

Le christianisme ne peut plus se renouveler par le changement des formes liturgiques, l’explication des textes bibliques, la valorisation des rites sacramentaux, il ne peut plus se contenter d’améliorer ce qui existe. Il doit intégrer les connaissances actuelles et  cesser de se replier sur lui-même. C’est ce que demandent nos contemporains, parfois sans le dire clairement. »

Hugues Lehnnebach

hlehne@orange.fr

 


[1]Serge Soulié, «  La Maison du rêve », Éditions La Barre Franche. P. 223

 

L’humanisme selon Laurent Gagnebin

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Karl Barth avait beaucoup proclamé l’absolutisme de Dieu. Pourtant il a fini par dire que sur ce point, il avait sans doute été un peu hérétique. Il a alors proclamé le oui de Dieu à l’homme. Sa pleine humanité. Dieu en effet n’existe pas sans l’homme.

La notion de l’humanité de Dieu existait chez Nicolas Berdiaeff. Emmanuel dans la Bible signifie bien « Dieu avec nous ». Mais de quel Dieu s’agit-il ? D’un Dieu cruel ? Vengeur ? Tyrannique ? Berdiaeff croit au Dieu de Jésus Christ.

Barlow de son côté dit que la rédemption, le salut accordé par la croix est une absurdité, car Dieu est amour. Le pasteur Charles Wagner annonçait que l’évangile a  humanisé Dieu et que l’idée d’un Dieu cruel doit être combattue. La notion de la rédemption fait appel au calcul selon lequel c’est le sang versé par le Christ  qui paye le prix du salut de l’homme.

Exode 3,14 : Dieu ne dit pas « Je suis celui qui est » Mais « celui qui deviens ».Moïse dit «  celui qui est m’envoie vers vous ». Le verbe être dit être remplacé par devenir. Chouraqui traduit par ces mots « Je serai m’a envoyé vers vous ».  Renan écrit en 1863 « Dieu n’existe pas encore ». Dieu est à venir ». Gagnebin ajoute : «  Nous devons combattre pur l’humanisation de Dieu » en reprenant les mots de Wilfred Monod « Il faut vouloir que Dieu soit ». Avoir la foi c’est faire exister Dieu. Schweitzer en débat avec Carrez dit : « C’est Jésus qui centre la foi chrétienne dans l’avenir, car le centre de gravité n’est pas du tout dans le drame de la rédemption »

 

La divinisation de l’être humain.

Toute la théologie grecque et orthodoxe héritière du quatrième siècle sont dominées par la théologie qui affirme que Dieu est devenu homme pour que l’homme puisse devenir Dieu. Irénée comme plus tard maître Eckart au 13/14 e siècle diront que Dieu est devenu homme pour que l’homme puisse  devenir dieu.  A Noël Dieu descend vers l’homme. A l’ascension, l’homme va vers Dieu. C’est un processus un dynamisme, une mouvance qui annonce une divinisation. Déification, divinisation, c’est une approche théandrique qui appartient à une double nature Dieu et homme.

D’après Berdiaeff l’homme est élevéà Dieu ; il est crééà l’image de Dieu, créateur, fidèle à la vocation de l’être humain, participant à l’œuvre divine. Cette déification est la condition de notre humanisation. Toutefois l’homme n’est pas Dieu. Maurice Bellet a écrit que Dieu est le plus humain de l’homme. Mais l’homme existe-t-il ? Pas encore ! Cet homme en plénitude existe en Jésus. Ecce homo dit Pilate. « Voici l’homme ». Nietzsche qui militait pour le surhomme pensait que l’homme doit être dépassé.

Romains 8,22 : « nous aussi qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption finale, la rédemption de notre corps ». L’homme a été créé pour participer de tout son être à la divinité disait Olivier Clément. Lutter pour l’humain est inséparable de la lutte pour tous les êtres humains. L’Esprit nous anime et nous porte. Il y a un dynamisme créateur de Dieu » vous êtes le temple de Dieu » dit Paul. Dieu est présent en nous. Il nous donne son Esprit.

Conclusion

La foi en Dieu implique la foi en l’être humain. Le christianisme ne peut vouloir affirmer Dieu sans affirmer l’homme. Tendre vers l’homme, c’est tendre vers Dieu. Emerson écrivait «  La plus haute réalisation de Dieu se trouve en l’homme. Les psychanalystes affirment que l’homme attribue à Dieu la tout puissance dont il rêve et en déduisent que l’homme est condamné au néant.

Une autre critique vient de l’Église Réformée qui affirme que Dieu seul est Dieu. Certes ! Dieu est d’une différence fondamentale, ce qui interdit toute confusion.  La pleine humanité implique la relation avec la transcendance. La vocation de l’homme est de devenir humain, c’est-à-dire à l’image de Dieu. Dieu n’écrase pas l’homme : il l’élève dans la personne de Jésus. Il le déculpabilise. Reconnaître notre vocation, c’est reconnaître que nous sommes responsables de Dieu. Revitaliser une théologie du Saint-Esprit n’est pas vitaliser une théologie de la croix.
Un groupe de pasteurs libéraux a été invitéà rédiger une confession de foi. Aucun d’eux n’a mentionné la croix. C’est Picon qui invitait à« décrocher » la croix. Enfin il faut se méfier de dire que Dieu est tout autre. Mieux vaut dire qu’il est radicalement autre.

 

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